La Minute Eco

La guerre à effet de levier où comment Poutine démultiplie les effets d’une invasion terrestre

Dans un monde en fragile équilibre après deux ans de pandémie, le rebond économique est déjà mis à mal par le maintien de goulets d’étranglement dans l’approvisionnement des chaînes de valeur et n’avait nul besoin de nouvelles sources de déséquilibre.

C’est dans cette période en équilibre précaire que le président de la République de Russie a choisi de mener une opération d’invasion massive de l’Ukraine. Vladimir Poutine est un trop fin stratège pour avoir lancé cette offensive au hasard : période post-électorale en Allemagne, période pré-électorale en France avec une opinion à fleur de peau, Italie fragile budgétairement, gouvernement déconsidéré en Grande Bretagne, président américain fragilisé par une évacuation impréparée des troupes d’Afghanistan…

Vladimir Poutine n’est pas sans savoir que toute sanction économique prise contre son pays se retournera aussi contre celui qui l’a décidée. La Russie est un acteur incontournable sur le marché des matières premières, elle produit 44% du palladium, 12% du pétrole, et 17% du gaz au niveau mondial. L’Europe achète donc à la Russie une partie importante du gaz, du pétrole et du charbon qui sert à alimenter ses centrales électriques à un moment ou la production nucléaire française est à un plus bas historique. Par ailleurs, l’Ukraine est le principal fournisseur de blé et d’engrais azoté, un enlisement du conflit aurait donc, rapidement, des effets dévastateurs tant sur l’économie que sur le moral des populations.

Ces différents leviers utilisés sciemment par le président russe pour mettre la pression sur l’Occident rendent ce moment particulièrement périlleux tant au niveau géopolitique, qu’économique.

La Minute Marchés

Retour vers la qualité

Dans des situations de stress, les marchés retrouvent très rapidement leurs fondamentaux : baisse des actifs risqués que sont les actions et les obligations d’entreprise, hausse des actifs “sans risque” que sont les obligations d’état et certains métaux précieux.

Le conflit ukrainien a donc provoqué un retour des capitaux sur les emprunts d’état et notamment les obligations d’état américaines dont le taux à dix ans qui avait augmenté de 100 points de base jusqu’à environ 2,50% en janvier, a perdu 80 points de base en l’espace d’une semaine à 1,70%.

Sur les marchés d’actions européens, point de salut mis à part les titres de sociétés liées à l’armement et à l’exploitation minière. Les valeurs européennes de la finance et de consommation ont le plus souffert de leurs investissements ou de leur dépendance à la Russie.

Le plus impressionnant reste l’envolée des prix des matières premières alimentaires, énergétiques et industrielles tant le poids de la Russie et de l’Ukraine sur les marchés mondiaux est important. Les prix du blé ont pratiquement atteint 400 euros la tonne en Europe pour l’échéance mai du contrat à terme, un record absolu.

La Minute Finance Perso/Pro

Quand les comptes courants et la trésorerie stable redeviennent un sujet

La pandémie a généré, pour certains agents économiques, des liquidités importantes conservées sur les compte courants essentiellement. Cette trésorerie dormante n’était pas un sujet lorsque l’inflation était proche de 1% comme cela a été le cas dans les dernières années en Zone Euro. L’histoire devient différente lorsque la hausse des prix à la consommation atteint 4% et probablement pas de manière transitoire comme cela a été dit il y a 1 an. L’érosion que subissent les comptes courants devient de nature à se s’interroger sur l’investissement de liquidités stables en profitant des primes de risque des placement à moyen/long terme sur des stratégies diversifiées (inflation, dollar, performance absolue, immobilier).

La flat tax est elle menacée ?

Au regard des besoins d’investissements publics dont la liste s’est allongée au fur et à mesure des crises qui obligent à sortir du déni : énergie, armement, éducation, santé, justice pour ne citer que les plus évidents, la dépense publique ne va pas diminuer demain et avec elle les besoins de financement. Si l’emprunt sera probablement encore utilisé de manière massive, des financements supplémentaires vont probablement devoir être mobilisés. Alors que la pandémie a permis à certains portefeuilles d’engranger des plus-values très importantes accentuant encore la différence entre les revenus du capital et ceux du travail et cela dans un contexte fortement inflationniste, il ne serait pas surprenant qu’une revue de la flat taux soit un des sujets post électoraux.